Pourquoi un nouveau décret ?

Laurent Garrouste : Lors de la parution du précédent décret en 2010, il avait été convenu avec les organisations professionnelles et syndicales du secteur de discuter à nouveau de certains sujets assez rapidement, tels que le travail isolé ou l’hygiène et, le cas échéant, de faire évoluer le décret si nécessaire. D’autre part, l’étude et l’analyse d’accidents du travail en forêt, notamment lors d’opérations réalisées en bûcheronnage manuel, a fait apparaître une situation préoccupante : le niveau d’accidents mortels et graves est très élevé. Les pouvoirs publics ne pouvaient pas rester sans réagir. Une campagne de contrôle menée en 2013-2014 par l’inspection du travail a fait apparaître un certain nombre de difficultés ou de manquements.

Quelles sont les nouvelles obligations liées à ce décret ?

L.G. : Le décret, sans révolutionner les règles applicables, renforce significativement les obligations de sécurité. Rappelons que celles-ci s’appliquent non seulement aux employeurs, mais aussi aux donneurs d’ordres et aux travailleurs indépendants, nombreux dans l’activité de l’exploitation forestière.

En premier lieu, la procédure de coopération entre donneur d’ordre et entreprises intervenantes sur le chantier a été précisée et clarifiée. La fiche de chantier doit désormais être datée et signée par l’ensemble des protagonistes, et comporter les mesures décidées d’un commun accord permettant de prévenir les risques découlant de l’intervention simultanée de plusieurs entreprises.

Les règles de sécurité ont été renforcées sur plusieurs points importants : l’organisation des secours, la vérification de la compétence des travailleurs affectés sur un chantier, l’abattage d’arbres encroués, le travail isolé, par exemple. Tout intervenant sur chantier forestier devra avoir suivi une formation aux premiers secours avant le 6 décembre 2017, y compris les professionnels indépendants. Certains travaux ne peuvent plus être effectués en situation isolée. C’est notamment le cas pour l’abattage d’arbres encroués ou l’exploitation de chablis à risque spécifiques réalisés en bûcheronnage manuel.

Le décret détaille également les prescriptions minimales en matière d’hygiène sur les chantiers, en distinguant le cas des chantiers courants et le cas des chantiers d’accès difficile.

Leur mise en place est-elle complexe ?

L.G. : Un temps d’adaptation est certainement nécessaire. Les donneurs d’ordres et les entreprises doivent approfondir la période de concertation en amont des chantiers, de façon à définir de manière optimale les mesures de sécurité décidées d’un commun accord et figurant dans la fiche de chantier. De même, s’agissant de l’hygiène, chaque entreprise doit adapter ses moyens, afin de répondre aux nouvelles obligations, même si ces mesures ont un coût limité. Une circulaire d’application devrait paraître d’ici à la fin de l’année et donner des précisions sur l’ensemble des nouvelles obligations contenues dans le texte.

Quel a été l’accueil des professionnels ?

L.G. : Le décret a été préparé par une concertation approfondie. Un groupe de travail du conseil d’orientation des conditions de travail (Coct) a planché sur le texte pendant deux ans, associant des représentants de l’ensemble des organisations concernées qui, au final, ont approuvé à l’unanimité son contenu.

Jérémy Lemière