Si le mouvement des gilets jaunes a un peu perturbé la fréquentation du Salon Vinitech-Sifel cette année, 2018 restera un beau millésime. De quoi réjouir les caisses de MSA Gironde, Sud Aquitaine, Dordogne Lot-et-Garonne et des Charentes, qui ont installé, au milieu des 45 000 visiteurs, un stand santé-sécurité au travail à destination des professionnels de la vigne.

Le résultat d’un travail concerté bâtit dans le cadre d’« un copil régional regroupant les équipes de conseillers en prévention des risques professionnels, de médecins du travail et d’infirmières en santé au travail des six caisses de MSA de Nouvelle Aquitaine, précise Claude Chaussée, directrice adjointe de la MSA Gironde et directrice déléguée ARCMSA (association régionale des caisses de MSA) Nouvelle Aquitaine. Nous préparons cet événement depuis un an. »

L’environnement de travail

Hall 1, allée B, travée 17. Une maquette d’exploitation viticole de deux mètres sur deux attire les visiteurs. Alors qu’ils s’attardent sur les personnages et autres pieds de vigne miniatures, Christine Dubon-Cazabat, conseillère en prévention à la MSA Dordogne, Lot et Garonne, en profite pour les interpeller sur différentes thématiques : les déplacements sur le domaine viticole, l’organisation des tâches, le rangement du local consacré aux produits phytosanitaires, l’hébergement des saisonniers, le nettoyage du matériel…

Photos : © Eve Dusaussoy/le Bimsa

Elle met en avant les sièges de vigne, manuels ou électriques, qui permettent de préserver le dos, les hanches et les genoux. Devant le minifourgon aménagé, elle rappelle l’avantage de « manger à l’abri quand il pleut ou de récupérer une tenue sèche, ces bonnes habitudes permettent de limiter les contractures musculaires ».

Le vigneron ? Un sportif de haut niveau !

Les troubles musculosquelettiques (TMS) occupent une bonne partie du stand MSA. Malgré l’évolution des équipements et la mécanisation d’un certain nombre d’actes, les travaux du vignoble restent physiques. Ils sollicitent beaucoup le corps.

Les équipes de santé-sécurité au travail distribuent des fiches pratiques et un guide méthodologique mis au point grâce à un travail commun entre la MSA Gironde et l’Aract Nouvelle Aquitaine, associant institutionnels et professionnels de la viticulture.

« La prévention des TMS est un thème qui nous tient à cœur à la MSA Gironde, confie Claude Chaussée. La Gironde recense plus de 50 % des TMS déclarés au niveau national en viticulture ; ainsi, pour les salariés agricoles de Gironde, 85 % des TMS concernent la viticulture.
Tout simplement parce que ce type culture implique des gestes très répétitifs : acanage, pliage, taille, relevage, épamprage… Mais aussi parce que nous pratiquons, dans notre région, le “prix fait”. »

Ce mode de rémunération, où le salarié est payé au nombre de pieds qu’il « réalise », incite à des journées de travail longues, des cadences élevées avec des temps faibles de récupération. « C’est dans l’intérêt du salarié d’aller vite pour en faire un maximum. Et l’employeur y trouve son compte puisque le travail est plus vite accompli. »

Dans la vigne, ce sont 14 000 coups de sécateur par jour.

L’épaule, le coude, le poignet et le rachis sont les premiers touchés, avec des pathologies parfois très invalidantes. « Dans la vigne, c’est 14 000 coups de sécateur par jour, constate Christine Dubon-Cazabat. Un même mouvement répété autant de fois crée forcément des problèmes de canal carpien ou de tendons. »

Le parallèle avec les sportifs de haut niveau est aisé : « Un tennisman qui donne plusieurs centaines de coups de raquette par jour adopte une bonne hygiène de vie, ça va de soi pour tout le monde. Pour la personne qui travaille dans la vigne, ça doit être pareil. » Bien manger, dormir, préparer ses muscles, s’hydrater, s’étirer… et alterner le travail entre les ceps. « On commence par les bois tendres pour permettre au corps de s’échauffer, puis on attaque les bois durs. Et quand l’équipe commence à se plaindre de douleurs, on revient sur des bois tendres », conseille Christine Dubon-Cabazat.

Anticiper grâce à la 3D

De l’autre côté du stand, la petite nouvelle qui fait parler d’elle, c’est l’animation réalité virtuelle. Elle a été commandée spécialement pour l’occasion. Alexis Pagnac, conseiller en prévention à la MSA Gironde, invite Marc, viticulteur, à enfiler un casque 3D pour un petit voyage dans un domaine vitivinicole.

Alexis Pagnac guide les visiteurs à l’intérieur d’un chais à barriques grâce à son animation en réalité virtuelle.

En l’espace de quelques secondes, le visiteur se trouve immergé dans un cuvier en Inox ou un chai à barriques, bien loin du parc des expositions. Cette visite virtuelle permet à Alexis Pagnac d’aborder l’aménagement des espaces et comment y faciliter le travail. « On intervient trop souvent en correction de situation : risque de chutes, stockage des produits, accès aux cuves… »

Le conseiller insiste sur l’intérêt d’intégrer la prévention dès la conception du chai. « Le nettoyage, par exemple, n’est pas souvent pris en compte alors qu’il fait partie du travail ; il prend même énormément de temps. Souvent les sols n’évacuent pas bien l’eau : augmenter la pente permet de faciliter le nettoyage et de réduire le temps consacré à cette tâche. »

Alors que Marc, bluffé par la réalité virtuelle, circule dans le chai à l’aide de son joystick, Alexis lui rappelle qu’il peut être accompagné par les professionnels de la MSA dans un futur projet d’aménagement : « Si besoin, nous vous rapprocherons de personnes ressources, comme un ergonome. L’objectif est d’améliorer vos conditions de travail, mais aussi de faire des économies en mettant en place des mesures préventives. »

Pour le viticulteur, l’idée est à décanter…