Pour trouver la première tiny house d’Un toit en Gâtine, il faut se rendre sur le terrain d’Eddy Fruchard, à Vausseroux. C’est ici, à 16 km de Parthenay, que le charpentier de Bois et paille l’a écoconstruite en collaboration avec un architecte poitevin, Grégoire Désert. Un projet auquel ont participé les jeunes de l’association, qui œuvre pour l’accès au logement.
Résultat : une jolie petite maison lumineuse en bois sur roues, 16 m2 au sol, mezzanine avec un lit deux places, chauffage au gaz, toilettes sèches, douche… et toute équipée (machine à laver, micro-ondes, vaisselle). Il n’y a plus qu’à poser ses valises.

Un projet participatif

Tout est parti d‘un diagnostic réalisé en 2016 par l’Union régionale pour l’habitat des jeunes, dans le cadre d’un appel à projet en faveur de la jeunesse du programme investissement d’avenir (PIA). Un manque d’offre sur ces communes rurales moins développées en a clairement émergé, ainsi que l’impossibilité de créer ne serait-ce qu’une micro-résidence.

« L’idée était de trouver des solutions pour accueillir des jeunes en mobilité professionnelle sur ces territoires dépourvus de toute offre locative, et dans lesquels la mobilité est réduite, explique Valérie Leloup, directrice d’Un toit en Gâtine. Il faudrait donc amener le logement au plus près. Parallèlement, nous développions une animation pour les sensibiliser à l’habitat écologique. L’idée a fait son chemin, et le projet s’est lancé en mars 2017, avec des entreprises locales. »

60 jeunes ont été associés au travail de l’architecte et à la définition des besoins. Des journées découverte des entreprises et des ateliers collectifs sur des pratiques écoresponsables ont été organisés, notamment avec des apprentis du CFA de Parthenay, qui compte un pôle bois, énergies, métaux. La première maison est sortie de l’atelier cet hiver et a été occupée par une stagiaire de Bois et Paille en février. « C’est notre première testeuse !, raconte Pauline Poupard, animatrice jeunesse d’Un toit en Gâtine. Elle relate son expérience tous les jours dans un guide. On lui a demandé de noter le moindre détail. »

Avec un coût de 53 000 € pour la maison seule, les soutiens financiers ont été indispensables. Outre l’apport du PIA, plusieurs acteurs se sont investis comme la CAF, la région Nouvelle-Aquitaine, le Crédit Agricole, la Fondation de France, la Fondation Sillon solidaire ainsi que la CCMSA et la MSA Poitou. Cette dernière connaît déjà bien l’association, partenaire de sa charte des solidarités « Bien vivre et bien grandir en milieu rural ». Sensibiliser les jeunes, leur permettre de vivre en milieu rural, rendre le territoire plus attractif par une offre novatrice d’habitat, les arguments ne manquaient pas.

Une solution alternative

« Il y a un gros travail de mobilisation des élus à faire pour trouver des emplacements susceptibles d’accueillir la maison, assure Karine Géron, conseillère sociale de territoire à la MSA. L’idée est de la présenter lors d’événements du territoire pour montrer concrètement de quoi il s’agit, et que c’est possible. » « Car beaucoup y voient un habitat précaire, ajoute Sarah Ravaud, référente précarité-habitat MSA Poitou. La MSA c’est aussi cela : apporter du soutien, aider à mobiliser, coordonner grâce à son expertise. Et ce projet peut être intéressant pour les saisonniers agricoles. Le besoin de main-d’oeuvre est là, certains artisans ne trouvent pas d’apprentis à cause du manque de solution de logement et de transport. »

Une remorque, contenant des panneaux photovoltaïques, un réservoir d’eau potable et un pour les eaux usées, sera également disponible pour la rendre autonome. Une deuxième maison va bientôt sortir du hangar de construction, avec déjà quelques aménagements revus. « Nous allons les tester avec différents profils, pour voir comment ils se l’approprient, comment ils y vivent et mieux estimer les consommations et l’autonomie des réservoirs, continue Valérie Leloup. Les jeunes qui vont y séjourner doivent être sensibilisés et jouer le jeu. Nous avons créé des petits guides, mais il faut s’assurer qu’ils soient en capacité de vivre en tiny house. C’est un style de vie particulier. »

L’association souhaite mettre à disposition six maisons d’ici à la fin de l’année, le temps d’ajuster encore les techniques de construction et les aménagements. Une redevance de 400 euros est appliquée, grâce à une subvention de la CAF des Deux-Sèvres, accordée à titre expérimental. En effet, les aides pour le logement ne s’appliquent pas aujourd’hui à l’habitat mobile. Grâce à cette collaboration, la personne fait une estimation de l’APL qu’elle pourrait obtenir si elle était en résidence habitat jeune, et ne paie que le résiduel.

Un pari complexe pour lequel l’association a fait appel à un cabinet extérieur pour assurer un suivi opérationnel pendant trois ans et une évaluation. Objectif : sortir un guide à la fin de l’expérimentation pour pouvoir éventuellement transposer le projet sur d’autres territoires. Pleine d’idées mais très lucide, l’association veut faire les choses bien et dans l’ordre, ce qui lui réussira forcément. Tiny, oui, mais certainement pas irréfléchi.

Visite guidée, avec Pauline Poupard :


Un toit en Gâtine

Un toit en Gâtine


Créée en 1986, Un toit en Gâtine est une association d’éducation populaire, située à Parthenay dans les Deux-Sèvres. Elle a pour objet l’insertion par le logement sur le territoire de Gâtine, qui réunit trois communautés de communes, soit 82 communes et 66 274 habitants.

Elle a développé une offre en matière d’habitat allant de l’hébergement d’urgence au logement d’installation et gère aujourd’hui :

– un foyer de jeunes travailleurs de 73 places
– un centre d’hébergement et de réinsertion sociale de 22 places
– un service avec une offre de logements temporaires ou en sous-location
– un service d’accompagnement social lié au logement
– un service mobilité avec location de vélos et scooters.

Pour répondre aux problématiques d’accueil des personnes migrantes, elle a également créé depuis 2016 un centre d’accueil et d’orientation pour les demandeurs d’asile, un accueil moyen et long séjours pour des mineurs non accompagnés et un centre d’hébergement provisoire pour les personnes bénéficiant d’une protection internationale.