Fruit du travail de la mission ruralité, lancée en avril, l’objectif est de mettre en place un agenda rural national, tout un programme visant à redynamiser les territoires ruraux.

Améliorer la vie quotidienne

Ayant fait de la réduction des inégalités territoriales l’une des priorités de son quinquennat, Emmanuel Macron a répondu favorablement à la demande de l’association des maires ruraux de France (AMRF), l’association internationale Ruralité-environnement-développement (RED) et l’Association nationale nouvelles ruralités (ANNR) d’établir un agenda rural national, c’est-à-dire un plan d’action en faveur des territoires ruraux qui s’inscrive dans la durée.

Cinq maires ou élus locaux, Daniel Labaronne (député de l’Indre-et-Loire), Patrice Joly (sénateur de la Nièvre), Dominique Dhumeaux (maire de Fercé-sur-Sarthe et président des maires ruraux de la Sarthe), et deux vice-présidents de l’association des maires de France (AMF), Cécile Gallien, maire de Vorey, et Pierre Jarlier, maire de Saint-Flour, ont ainsi reçu pour mission « dans un contexte de mutations profondes de la ruralité et d’un sentiment d’abandon » de « proposer des actions concrètes et de débroussailler les politiques publiques ».

Ce qu’exprime plus clairement Jacqueline Gourault : « J’ai souhaité que la mission formule des propositions pour améliorer la vie quotidienne des habitants des territoires ruraux dans des domaines tels que l’accès aux services essentiels, la revitalisation des territoires, la transition écologique, l’agriculture, la santé, l’emploi, les mobilités mais aussi sur des thématiques plus rarement appréhendées par les politiques publiques comme le renouvellement des générations, le vieillissement et l’isolement, la culture ou encore l’économie sociale et solidaire. »

180 personnes auditionnées, 200 propositions

À l’issue des auditions, un premier constat s’impose : « Il n’y a pas une ruralité mais des ruralités, dans des situations très différentes, et pour lesquelles il faut des mesures différenciées. » Ce que n’a pas manqué de rappeler la ministre, allant jusqu’à parler de « cousu main » et de « boîte à outils ». Elle a indiqué que les mesures devaient être « suffisamment souples pour que l’on puisse adapter les réponses à chaque territoire ».

Santé, mobilité et numérique : le trio de tête

Après trois mois de consultation, soixante auditions organisées et cent quatre-vingts personnes auditionnées, la mission Agenda rural a dressé une liste de deux cents propositions. Elle s’articule autour des domaines de l’éducation, des services publics, de l’agriculture, du développement économique, de l’emploi et de la formation, de l’habitat et du logement, de la transition écologique, de la jeunesse, de la culture, du sport, de la vie associative, de l’autonomie et du grand âge.

En tête des propositions, se trouvent les mesures ayant trait à la santé, aux mobilités et au numérique. Pour la santé, les suggestions clés consistent à « rendre obligatoire les stages des internes en milieu rural, ce qui représenterait l’équivalent de trois mille médecins immédiatement disponibles » et à « accélérer le recrutement de quatre cents médecins salariés par le gouvernement en zones sous-dotées et porter ce nombre à six cents ».

En ce qui concerne les mobilités, la plupart des associations d’élus demandent de « transférer une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) perçue par les régions pour abonder les autorités organisatrices de mobilités (AOM) rurales » et de « relancer dans les territoires ruraux le permis à un euro par jour via un prêt à taux zéro ».

Pour le numérique, les opérateurs sont en ligne de mire puisqu’ils devraient être « obligés à mettre en place le partage des données » et « assurer le respect des conventions de couverture numérique ».

L’accès aux soins, la possibilité de se déplacer et la couverture numérique sont en effet primordiales à l’édification d’« une ruralité dynamique et attractive », selon Cécile Gallien.

Redynamiser les zones rurales

Les dix propositions relatives à la santé, aux mobilités et au numérique ne doivent pas pour autant oblitérer celles des autres domaines comme l’éducation, les services publics, l’agriculture ou l’emploi et la formation, toutes aussi essentielles à la redynamisation des territoires ruraux.

Il est ainsi question de « prolonger le régime des zones de revitalisation rurale (ZRR) jusqu’en 2022 », « de lancer un plan en faveur de la revitalisation des petites villes et bourgs-centres », de « garantir l’accès à un socle de services universels à moins de 30 minutes de trajet », d’« encourager les nouvelles pratiques agricoles, notamment l’exercice collectif des activités agricoles et l’agriculture biologique », de « poursuivre l’expérimentation territoire zéro chômeur de longue durée et l’étendre à 30 nouveaux territoires ruraux », de « mettre en place un fonds de solidarité environnementale, alimenté par les collectivités territoriales et les entreprises les plus polluantes, qui rémunèrerait les services environnementaux rendus par les territoires ruraux vertueux en matière de transition écologique et énergétique » ou encore d’« améliorer l’accueil des personnes âgées en milieu rural : revaloriser les métiers du vieillissement (formation et rémunération), prendre en compte le critère de distance dans les modalités de tarification des services d’aide à domicile et l’accueil du maintien à domicile ».

Comme toujours, le nerf de la guerre étant le financement, la réussite de l’agenda rural repose, selon les élus, sur la création d’un fonds national de cohésion des territoires (FNCT) qui inclurait le fonds national d’aménagement du territoire (FNADT), doublé d’un « fonds de péréquation sur les territoires riches ».

Désormais entre ses mains, le rapport et ses 200 propositions doivent être « expertisé » par le gouvernement qui livrera ses conclusions lors du congrès de l’AMRF à Eppe-Sauvage (Nord), le 21 septembre prochain.

Trois nouveaux principes fondateurs de développement et de solidarité des territoires.

• L’équité doit compléter le principe d’égalité : la nécessité d’une accessibilité physique et virtuelle en tout point du territoire, à des services publics et d’intérêt général, notamment en matière de santé et d’éducation mais pas forcément les mêmes, de la même manière et au même niveau partout ;

• La capacité plutôt que le soutien et l’assistance : avec la décentralisation, chaque territoire doit disposer des moyens techniques et financiers d’élaborer et de développer son projet, de s’organiser et de susciter l’émergence de projets et d’actions dans tous les domaines ;

• La solidarité plutôt que la juxtaposition assortie de coopérations à la carte : dans une organisation territoriale optimisée, il y a nécessité de développer le dialogue entre les territoires, les coopérations et les partenariats à des échelles diverses (pays, bassins de vie, réseaux de villes et de territoires).

Photo : © Sylvain Cambon/CCMSA Image.